Nantes, France- Dès le début de l’épidémie de Covid 19, les patients diabétiques ont été considérés comme plus vulnérables que la population générale. Ils représentent 20 % des patients hospitalisés pour Covid. Pourquoi le diabète est-il un facteur de risque de sévérité et de décès chez les patients Covid-19 ? Peut-on mettre en évidence des facteurs prédictifs des formes sévères ?

C’est ce que vise à comprendre l’étude observationnelle française CORONADO qui vient de démontrer qu’un patient diabétique sur dix décède dans les 7 jours suivant l’hospitalisation pour Covid-19 et qu’un sur cinq est intubé et ventilé dans ce même délai. Elle montre aussi que l’âge, l’obésité et l’apnée du sommeil sont associés à la gravité des symptômes de ces patients diabétiques alors que l’HbA1c, l’insuline et les autres traitements du diabète, ne sont pas, à 7 jours, des facteurs de risque de forme sévère de Covid-19.

Ces résultats sont publiés dans Diabetologia [1].

1 317 patients diabétiques Covid-19

Démarrée fin mars, l’étude observationnelle CORONADO a porté sur 1317 patients diabétiques Covid-19 admis dans 53 hôpitaux français. Son objectif était de déterminer les facteurs prédictifs des formes sévères, à savoir le décès ou la nécessité d’assistance respiratoire par ventilation mécanique dans les sept jours suivant l’admission. Autrement dit, quel était le phénotype des diabétiques qui développeraient une forme grave du COVID ?

Les données, à sept jours après l’hospitalisation, seront complétées prochainement par des résultats à 28 jours après l’hospitalisation. Interrogé par Medscape édition française, le Pr Bertrand Cariou (Institut du thorax, CHU Nantes), auteur principal de l’étude, s’attend à une augmentation du nombre de décès et peut-être à voir émerger les facteurs associés à un retour à domicile.

Profil des patients diabétiques hospitalisés

La majorité de cette cohorte avait un diabète de type 2 (88,5 %) et seulement 2,3% un diabète de type 1, les cas restants étaient atteints d’autres types de diabète. Dans 3% des cas, le diabète a été diagnostiqué pendant l’hospitalisation pour Covid-19.

Sur les 1317 patients, 64,9 % étaient des hommes avec un âge moyen de 70 ans et un IMC médian de 28,4. Les complications microvasculaires (yeux, reins et nerfs) et macrovasculaires (artères du cœur, du cerveau, des jambes) du diabète concernaient respectivement 46,8 % et 40,8 % des cas.

10,6 % (IC95% [9,0- 12,4]) des participants sont décédés dans les sept jours suivant l’admission, 20,3 % (IC95% [18,1-22,5]) ont été transférés en réanimation pour assistance respiratoire par ventilation mécanique au cours de la même période.

Quels sont les facteurs d’aggravation ? 

Les complications microvasculaires ou macrovasculaires font plus que doubler le risque de décès à sept jours (OR 2,14 [1,16- 3,94] et OR 2,54 [1,44- 4,50], respectivement ).

L’âge est aussi un facteur de risque de décès (OR 2,48 [1,74- 3,53]) : les patients âgés de 75 ans et plus avaient un risque de décès 14 fois supérieur aux patients de moins de 55 ans, tandis que ceux de 65 à 74 ans avaient un risque triplé par rapport aux moins de 55 ans.

Une apnée du sommeil triple quasiment le risque de décès à 7 jours (OR 2,80 [1,46- 5,38]).

Enfin, l’obésité, définie par un IMC important, est associée à un risque à la fois de décès et de transfert en réanimation pour assistance respiratoire mécanique (OR 1,28 [1,10-1,47]).

« On retrouve clairement l’impact de l’obésité (modification de la réaction immunitaire, insulinorésistance, inflammation de bas grade). En regardant en détail les classes d’obésité, on a déterminé que l’obésité sévère avec un IMC>40 était un facteur indépendant prédictif de mortalité » indique le Pr Bertrand Cariou, interrogé par Medscape édition française.

Marine Cygler

3 juin 2020