Bernard BAUDUCEAU, Saint-Mandé

Emanuelsson F et al. Hyperglycaemia, diabetes and risk of fragility fractures: observational and Mendelian randomisation studies. Diabetologia 2024 ; 67 : 301-11.

Le diabète entraîne une majoration du risque de fracture en raison de la diminution de la densité minérale osseuse (DMO) au cours du diabète de type 1. Dans le diabète de type 2, la DMO est paradoxalement normale ou élevée mais le risque fracturaire est cependant augmenté du fait d’une réduction du remodelage et d’anomalies de l’architecture osseuse.

Cette étude avait pour objectif de déterminer le rôle de l’hyperglycémie dans la survenue de fractures et d’examiner si ces fractures liées à la fragilité osseuse étaient associées à une élévation de la mortalité toutes causes confondues au cours du diabète.

Au total, 117 054 personnes de la Copenhagen City Heart Study et de la Copenhagen General Population Study (les études de Copenhague) et 390 374 participants de la UK Biobank ont été inclus pour réaliser des analyses observationnelles et de randomisation mendélienne. La randomisation mendélienne est une approche épidémiologique qui utilise des variants génétiques fortement associés à un phénotype spécifique, ce qui permet de limiter les risques de biais et les facteurs de confusion.

Les fractures liées à la fragilité osseuse ont été définies comme celles qui intéressent la hanche, la colonne vertébrale et les membres supérieurs (humérus ou poignet). Ces observations ont été collectées à partir des registres nationaux de santé. Les données concernant la glycémie et l’HbA1c de 196 743 participants ont été analysées en fonction de la survenue des fractures liées à une fragilité osseuse.

L’élévation de la glycémie à jeun ou non et de l’HbA1c était associée à un risque plus élevé de fracture (p < 0,001). Ainsi, le Hazard Ratio (HR) pour la survenue d’une fracture était de 1,50 (IC95% : 1,19 à 1,88) dans le diabète de type 1 et de 1,22 (IC95% : 1,13 à 1,32) dans le diabète de type 2.

La randomisation mendélienne sur un échantillon a confirmé une association causale entre une élévation de la glycémie non à jeun et un risque accru de fracture du membre supérieur dans la combinaison des études de Copenhague et de la UK Biobank avec un HR de 1,41 (IC95% : 1,11 à 1,79 ; p = 0,004). Des résultats similaires ont été observés avec la glycémie à jeun et l’HbA1c dans les analyses de randomisation mendélienne sur deux échantillons avec pour la glycémie à jeun un HR de 1,50 (IC95% : 1,03 à 2,18 ; p = 0,03) et de 2,79 (IC95% : 1,12 à 6,93 ; p = 0,03) pour l’HbA1c.

À l’âge de 80 ans, les taux cumulés de décès étaient de :

  • 27 % chez les personnes ayant présenté une fracture ;
  • 54 % chez celles atteintes de diabète ;
  • 67 % chez les personnes souffrant des deux affections ;
  • 17 % chez celles indemnes de fracture ou de diabète.

En dépit des biais de cette enquête, notamment en ce qui concerne la fréquence des chutes liées à la neuropathie ou aux hypoglycémies, cette étude confirme que l’hyperglycémie constitue un facteur de risque de fracture liées à la fragilité osseuse. Les analyses de randomisation mendélienne ont établi un effet causal de l’hyperglycémie sur les fractures du membre supérieur. Enfin, la coexistence d’un diabète et de fractures entraîne un risque de décès très élevé.

Cette complication du diabète doit être bien connue afin d’engager le traitement d’une fragilité osseuse dès que nécessaire avec une efficacité équivalente à celles des personnes non diabétiques. Enfin, le contrôle glycémique par insuline ou la plupart des antidiabétiques oraux hormis les glitazones, diminue le risque de fracture comme l’ont montré de nombreuses études.